Plan Mort: de la grève de la C.L.A.S.S.E. à la guerre de classes

Depuis Anti-dev

Bref reportage de l’intérieur sur l’émeute du 20 avril contre le Plan Nord

Ça a largement été une superbe journée de lutte, même si elle n’a peut-être pas été complètement victorieuse. Dès le premier moment, ça se sentait que cette jour allait être le nôtre, tout comme le mien… et ça paraissait jusque dans les black blocs chantant et rigolant dans la sérénité alors qu’ils-elles mettaient leur attirail. L’esprit de la Terre autochtone nous animait; harmonieux-euses, même dans notre détermination à semer le désordre.

Et grâce à l’incompétence de la Police fasciste de Montréal (le (S)SPVM étant surtout efficace à se mettre à plusieurs sur des individus, des gens de la rue) et au nihilo-capitalisme indifférent de l’élite politique, cette manifestation du 20 avril contre le Plan Nord corporatiste, gigantesque plan de développement visant à dérober et violer environ 70% de la Nature dans le Grand Nord -surtout par l’industrie minière et le développement hydroélectrique- a tourné au vinaigre, celui qui fermentait, depuis un bon bout déjà, au fond d’un tas d’étudiants et radicaux confondus.

Passant en mode sabotage et combat de rue dans une zone reconnue comme un haut-lieu de gentrification et de pacification (le quartier diplomatique-financier, pris dans le creux allant de Saint-Laurent jusqu’à Peel) , les manifestant(e)s d’allégeances diverses ont envahi les rues ensemble et ont tourné l’ouverture du “Salon du Plan Nord” au Palais des Congrès en un microcosme de la guerre de classes, contre la plus grosse et la plus violente poussée vers une nouvelle vague de colonisation de l’Île de la Tortue depuis longtemps. Ça a montré à quel point l’opposition au développement industriel corporatif est devenue grande et forte.

(Par ailleurs, cette manifestation a aussi été doublée d’une tentative d’action contre un discours du Ministre de l’Immigration Jason Kenney , un suprémaciste blanc du gouvernement Harper, au Marriot Hotel, dans la défense de la nouvelle Loi C-31, visant à restreindre encore plus les possibilités pour les réfugiés, en particulier les Roms, d’avoir leur statut légal reconnu par le gouvernement fédéral. Alors qu’actuellement des milliers de Roms sont la cible de progroms racistes et de détentions en camps de travail sous le gouvernement néo-Nazi Hongrois, ça constitue un équivalent direct aux politiques d’immigration restrictives de la plupart des démocraties Occidentales durant la Seconde Guerre mondiale, qui ont facilité l’Holocauste.)

Ça finit enfin par péter…

Dehors, des combats ont pris place entre les forces de Police et les émeutiers, allant dans un va-et-vient successif, où les manifestants ont fait usage à profusion de l’infâme tactique black bloc de la “dispersion pour se regrouper ailleurs”, produisant alors une bataille intense et une machine à destruction massive de l’ordre qui s’étenda sur une bonne partie de l’après-midi. Ça commença par la destruction totale d’une des entrées principales du Palais, par des bombes de peinture et des pierres, juste après qu’un(e) manifestant(e) se fit tirer un coup de bombonne de gaz CS au visage (à environ un mètre de distance), où la Police dû entrer se réfugier à l’intérieur pendant un bon moment.

Entretemps, des manifestants purent se faufiler à l’intérieur du gigantesque bâtiment futuriste aseptisé, par une porte de service, et se rendirent non loin de l’endroit où la conférence se tenait, mais furent repoussés à la dernière minute par des flics anti-émeute. La bataille, à l’intérieur comme à l’extérieur, a réussit à retarder l’élocution du Premier Ministre Charest, alors qu’ils fut aussi contraint de laisser tomber la séance de photos d’ouverture.

Puis, alors que la bataille continuait de se répandre dans les environs du Palais, les facades de nombreux bureaux et commerces desservant l’élite capitaliste furent saccagées, incluant le Centre de Commerce Mondial, avec ses facades successivement passées au graffiti (un “A” rouge fut d’ailleurs peint sur le logo du “W” à l’entrée face au QG de l’IATA et à la Bourse de Montréal, avec “Plan Mort” à côté) puis au cassage de vitres. Mais pour mettre un peu de côté un peu le pouffage de rire, je tiens quand même à rappeller qu’un certain nombre manifestant(e)s ont été gazés et violentés, quelques dizaines arrêté(e)s; mais aussi quelques flics ont été blessés dans les batailles de rue, qui a tourné à un certain point dans une pluie de roches, morceaux de pavé et n’importe quoi d’autre d’assez pertinent pour être lancé contre la Police violente, mais visiblement apeurée.

Face au déchaînement de la colère -en premier verbale et plus physique par la suite- de plusieurs manifestants, aussi face à leur nombre surprenant (je dirais deux mille, environ), la Police s’enlisa dans la désorganisation, avec quelques drôles scènes d’agents se faisant encercler, alors que la peur généralisée était palpable dans leurs rangs, particulièrement alors que des poches d’émeutiers foutaient le désordre à plusieurs endroits en même temps. Ils ne furant pas que soudainement débordés, mais perdaient aussi la face en tant qu’“épouvantails du peuple”, surtout dans la tête des gens, alors que de plus en plus de passant(e)s se rassemblaient aussi pour se joindre à “l’indignation” alors qu’ils furent traités de la même manière que les manifestants. Plus ou moins cette même sorte de gens que les profiteurs/promoteurs corporatifs à l’intérieur tentaient d’acheter par une grosse carotte vide, faite de belles promesses, ce même prolétariat de toujours plus frustré se faisait maintenant imposer l’argument répressif, primitif, écervelé du bâton. Or il semble qu’il y a de plus en plus de gens qui ne laissent pas embobiner par ça.

Bizarrement, alors que la bataille de rue continuait de se dérouler entre les murs du centre financier du centre-ville, les cris et les flashbangs étaient étouffées, à quelques rues plus loin, par le bruit du flot ordinaire du trafic, avec seulement les hélicoptères de la Police qui tournaient au-dessus des passants comme des oiseaux de proie, comme faible signal que quelque chose de “gros” se passait quelque part, s’ajoutant à cela les dépèches à la radio d’un total chaos prenant place au Palais des Congrès… le genre de chose dont des prolos ne rêveraient que dans leurs rêves les plus juteux. Peut-être attendaient-ils-elles qu’une bande de black blocs sorte de nulle part et leur montre le chemin pour se libérer de leur esclavage quotidien?

Il y eut un autre jour de manifestation, beaucoup plus calme, contre le Salon le lendemain, ainsi qu’une grosse marche symbolique pour célébrer le Jour de la Terre, où les femmes Innu de la Côte-Nord furent aceuillies après leur longue marche tout au long de la route 138 en protestation contre l’invasion de leur territoire par Hydro-Québec dans la complicité des “hommes d’affaires” de leur Conseil de bande. Pour des reportages vidéo de tous les événements, tout comme des autres manifestations étudiants, on vous invite à aller sur CUTV Montreal.

Pour la libération de la Terre… dans la rue!

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